Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré hier, samedi, que les zones de l’Ukraine où se tiennent des référendums seraient sous la « protection totale » de la Russie si elles étaient annexées par Moscou, dans un contexte de craintes que la Russie puisse intensifier le conflit et même utiliser des armes nucléaires.
Dans son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies et dans son entretien avec les médias internationaux à New York, le ministre russe des affaires étrangères a cherché à justifier l’invasion de l’Ukraine voisine par son pays en répétant les affirmations mensongères de Moscou selon lesquelles le gouvernement élu de Kiev est illégitime, rempli de néonazis et opprime les russophones dans l’est de l’Ukraine.
Les référendums organisés par la Russie dans quatre régions de l’est de l’Ukraine ont débuté vendredi, dans le but d’annexer ces territoires qu’elle a saisis par la force. Kiev a dénoncé le fait que les habitants sont contraints de voter et ne sont pas autorisés à quitter ces zones pendant le référendum de quatre jours, que les pays occidentaux ont qualifié de « fraude » visant à justifier une escalade dans la guerre qui dure depuis sept mois en Ukraine.
« Après ces référendums, la Russie respectera certainement l’expression de la volonté de ces personnes qui, pendant de nombreuses années, ont subi les abus du régime néonazi », a déclaré M. Lavrov lors d’une conférence de presse après son discours à l’Assemblée générale des Nations unies.
Interrogé sur le fait de savoir si la Russie aurait des raisons d’utiliser des armes nucléaires pour défendre les zones annexées de l’Ukraine, M. Lavrov a répondu que le territoire russe, y compris le territoire « qui sera ultérieurement inscrit » dans la constitution russe, « est sous la protection totale de l’État. »
« Les lois, doctrines, concepts et stratégies de la Russie seront appliqués sur l’ensemble de son territoire. »
« Toutes les lois, doctrines, concepts et stratégies de la Fédération de Russie seront appliqués sur l’ensemble de son territoire », a-t-il noté, faisant aussi spécifiquement référence à la doctrine russe sur l’utilisation des armes nucléaires.
Ces déclarations interviennent après que l’ancien président russe Dmitri Medvedev, un allié du président russe Vladimir Poutine, a explicitement averti jeudi que toute arme de l’arsenal de Moscou, y compris les armes nucléaires stratégiques, pourrait être utilisée pour défendre des territoires incorporés à la Russie.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmitry Kuleba, a déclaré que les commentaires de M. Lavrov et la déclaration antérieure de M. Poutine, qui a dit qu’il ne bluffait pas au sujet de l’utilisation d’armes nucléaires, étaient « irresponsables » et « absolument inacceptables ».
« L’Ukraine ne reculera pas. Nous appelons toutes les puissances nucléaires à s’exprimer maintenant et à faire comprendre à la Russie que cette rhétorique met le monde en danger et ne sera pas tolérée », a tweeté M. Kuleba.
La Russie accuse les États-Unis et d’autres pays d’être parties au conflit pour avoir envoyé des armes afin d’aider l’Ukraine à se défendre. L’éventuelle annexion du territoire ukrainien soulève la question de savoir comment la Russie peut répondre à l’utilisation d’armes occidentales dans ces régions.
L’Ukraine a également demandé une session d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU sur ces référendums, exigeant que la Russie soit « tenue responsable de ses efforts supplémentaires pour modifier les frontières internationalement reconnues de l’Ukraine en violation de la Charte de l’ONU », a indiqué le porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, Oleg Nikolenko, sur Twitter.
Recrutement
Mercredi, M. Poutine a ordonné la première conscription en Russie depuis la Seconde Guerre mondiale, une annonce qui a incité certains Russes à se diriger rapidement vers la frontière, avec une augmentation du trafic aux points frontaliers avec la Finlande et la Géorgie et une envolée des prix des voyages aériens au départ de Moscou.
Interrogé hier sur les raisons pour lesquelles tant de Russes quittent le pays, M. Lavrov a évoqué le droit à la libre circulation.
Poutine a déclenché une invasion à grande échelle de l’Ukraine en faisant valoir que l’expansion de l’alliance de l’OTAN dirigée par les États-Unis après l’effondrement de l’Union soviétique menace la Russie.
Lorsqu’on lui a demandé s’il pouvait envisager de futurs pourparlers avec les États-Unis qui permettraient à la Russie de se sentir plus en sécurité face à l’intrusion de l’OTAN, telle que Moscou la décrit, M. Lavrov a répondu que c’est l’Occident qui a rompu les précédents pourparlers. Son homologue américain Anthony Blinken a interrompu les pourparlers à la veille de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, déclarant que le déploiement de forces russes à la frontière de l’Ukraine constituait un « rejet de la diplomatie ».
« Nous ne disons pas non aux contacts. Et lorsque des propositions allant dans ce sens sont présentées, nous les acceptons. Si nos partenaires souhaitent que nous nous rencontrions discrètement, afin que personne ne soit au courant, c’est très bien, car il est toujours préférable de parler que de ne pas parler », a déclaré M. Lavrov. « Toutefois, dans la situation actuelle, la Russie ne va tout simplement pas faire le premier pas », a-t-il noté.
M. Lavrov a cherché à donner l’impression que l’opposition à la guerre de la Russie en Ukraine se limite à Washington et aux pays sous son influence. La Russie tente de surmonter son isolement international alors que près des trois quarts de l’Assemblée générale des Nations unies ont voté en faveur d’une réprimande à l’égard de Moscou en mars.
Le partenaire stratégique de la Russie, la Chine, a adopté des positions fermes, critiquant les sanctions imposées par l’Occident à la Russie, mais s’abstenant de cautionner ou d’offrir son aide dans la campagne militaire. Pourtant, dans un aveu inattendu la semaine dernière, M. Poutine a déclaré que le président chinois Xi Jinping était préoccupé par l’Ukraine.
Interrogé enfin pour savoir si la Russie subissait une quelconque pression de la part de la Chine pour mettre fin à la guerre, Lavrov a répondu : « Vous pouvez dire à vos lecteurs, auditeurs, téléspectateurs que je me suis abstenu de répondre à votre question. »
Source : APE-MPA
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